La Peintre et le Samouraï sont heureux de vous faire partager leurs nouvelles aventures

Mariés en 2004, plus de vingt ans après notre première rencontre dans une école d'art à Paris, nos chemins se sont séparés, puis réunis par un caprice du destin. Partant du principe que la vraie vie, celle que l'on choisit, commence à partir de 40 ans, nos avons décidé de choisir aussi notre pays et nous sommes donc installés au Québec en 2007 avec notre fils Ziggy, ainsi que Cyran, le fils d'Isabelle ; Julia, la fille d'Isabelle, ayant décidé de rester en France. Notre fidèle chienne labrador Oriane nous a suivi et les jeunes Padawan (un poulain) et Chewbacca (un chiot) ont depuis peu rejoint la tribu Teafortwo.
Pourquoi la Peintre et le Samouraï ? Parce que nos deux passions, la peinture pour Isabelle et l'aïkido pour Gilles, dirigent nos existences, au même titre que la nature, les animaux, la bonne bouffe et les joies simples de l'existence.

dimanche 31 octobre 2010

3 ans et 120 jours et un peu plus

À mon tour de raconter mon expérience en nouvelle-France.
Eh bien, au bout(e) de ces trois années, pour la job, on peut dire qu'elles ont été de toutes les couleurs et multiples. Vous en avez un petit aperçu dans l'article d'Isa. Mais il y en a d'autres, pas piquées des vers.
C'est sûr que maintenant je suis casé avec le pont Honoré Mercier jusqu'en 2012, au moins, et après sur d'autres projets avec l'une des plus grosses boîte d'ingéniérie au Québec - soit dit en passant , mon grand-père maternel était ingénieur, et il a été l'un de ceux qui a contribué à l'électrification de la Savoie dans les années 20 - avec un poste de commis de bureau (et pas comique de bureau), chargé du contrôle documentaire. Sans détailler, je me retrouve à faire de l'archivage, comme en France à l'Hôpital St. Joseph, mais respecté et faisant partie intégrante d'une équipe, et devenant expert avec Excel et les formules alambiquées et avancées.

Bref après presque trois ans dans la boulangerie-pâtisserie avec des salaires de misère, des horaires-horreurs (soit entrant vers 17, 18 h le soir et finissant à 3, 4h le matin, soit dès potron-minet à 3, 4h et finissant à 13, 14h) ce n'était pas compatible avec à la fois pour la santé et la vie de famille. Pas étonnant qu'il y ait beaucoup de divorces et de séparations dans ce milieu. Et surtout, retour à la case départ : employé administratif avec des horaires de travail à faire rêver le plus privilégié des fonctionnaires : 7h30-16h, avec 1 demie-heure de pause. Bon c'est sûr il n'y a que 15 jours de congés (ça vous ferait hurler en France avec des congés comme nous dans le privé ; dans le public c'est plutôt 4 semaines), mais je peux bénéficier de formations et tous les ans le salaire est augmenté, largement plus que dans la fonction publique.
Mais avec un plus par rapport à la France, comme je l'ai dit : respect, prise d'initiatives , développement technologique, encouragement aux formations - cf. la formation bureautique que j'ai suivie au Centre de Compétences Rive-Sud de la Prairie.

C'est incroyable, car lorsque j'ai été lourdé de Première-Moisson après mon travail en septembre de l'année dernière, comme ça, à sec, sans préavis (licencié le soir même avec effet immédiat) , j'ai pu bénéficier, après quelques errances dans d'autres Métiers de bouche (principalement chez des traiteurs, mêmes hassidiques !), de cette formation prise en charge. J'étais motivé à fond la caisse pour me recycler et ne plus jamais entendre parler bouffe, comme professionnel. Na !

J'ai commencé la session début décembre 2009 et terminé en mai 2010, un mois avant la fin officielle. En effet, alors que je devais faire un stage de 2 semaines dans un CHSLD, grosso merdo, un centre d'hébergement longue durée (à vie en fait) pour personnes lourdement handicapées, comme adjoint-administratif pour réorganiser les archives, un jour, une des enseignantes m'a proposé un poste de commis de bureau pour un consortium qui s'occupe de la rénovation du pont H. Mercier, à pourvoir dans la semaine suivante. Mon background et les exigences demandées coîncidaient pile-poil. J'ai dit oui tout de suite, envoyé mon cv par courriel à l'adjointe-adminisitrative chargée du recrutement. Appel 2 minutes après, rdv le lendemain et signature du contrat dans la foulée de l'entretien d'embauche. Un parcours rêvé. Je me suis dit que si ça n'était pas moi, ça serait une ou un autre qui aurait le job.
Parmi les exigences du poste : travailler avec Excel et connaître l'anglais. Étant donné que j'avais suivi des cours d'une des langues officielles du Canada à la fois au centre et au privé, ça roulait ma poule !
D'ailleurs, soit-dit en passant, ici au Québec, si tu veux travailler dans le privé, il faut être bilingue, et dans le public aussi (comme la Saaq ou la Ram-Q).
Mais quant tu veux taffer dans le public, il faut mieux maîtriser le français, et là c'est pas gagné, vu comme il est 'accomodé'. Pourtant le Québec se bat bec et ongle pour préserver la langue de Molière, entouré des méchants anglophones qui veulent, depuis 400 ans assimiler les francophones.
Tout comme le Canada et le Québec aussi ont voulu assimiler les amérindiens en les privant de leurs langues et coutumes ancestrales. Nous en France, on est pas mieux : esclavage et colonisation afin de faire croire que l'on était une nation supérieure et que les colonisés ou esclaves des sauvages incultes. Tu parles d'une civilisation des lumières et de la raison. Les plus intelligents et supérieurs ne sont pas ceux que l'on croient. Et une civilisation, comme celle des occidentaux où est évacuée toute spiritualité, avec un matérialisme qui devient Dieu, une foi absolue en la science triomphante et rassurante, ne peut qu'aller à sa perte et disparition. Bah les petits ou grand mystères sont éternels. (En orient aussi ça commence à lâcher)
Mais je m'égare (St. Lazare réveille-toi), comme dirait l'autre.

Pour en revenir, non pas aux moutons, mais aux caribous, si je travaille à Kahnawake, en territoire Mohwak,ce n'est pas par hasard : attirance pour la culture amérindienne et pour le pont H.Mercier, qui me fascine depuis que nous avons posé les pieds en terre québécoise.
Quand je travaillais pour Première Moisson, comme boulanger-robot à Dorval, à partir d'octobre 2008, encore pleins d'espoirs et de rêves sur cette noble profession artianale, je prenais ce pont interminable qui enjambe à la fois la voie maritime du St. Laurent et le fleuve du même nom.
Architecture d'acier et de béton, qui s'élève haut dans les cieux. Il est beau et fascinant et fonctionne sous deux juridictions différentes avec une partie en plein territoire Mohwak. Pas simple à gérer car il faut une bonne entente tri-partie et des entendements raisonnables.

Pour revenir à mon expérience en boulangerie-pâtisserie, soit j'ai travaillé pour de la grosse cavalerie standardisée et mal payée, soit pour des artisans qui, soient ne me disaient pas le salaire lors des entretiens, ou alors qui ont fait faillite. J'ai tout essayé en trois années, tous les cas de figure ce qui fait que maintenant, bibi en connaît un rayon sur le blindage et les conditions de travail dans les métiers de bouche avec la méthode et les conditions à la sauce nord- américaine. Comme disait Aznavour : je m'voyais déja en haut de l'affiche. Par rapport aux images d'Épinal idéalisées et forgées lors de ma formation pour le CAP de boulanger, la réalité est autre, plus axée sur une standardisation, une productivité et et une efficacité accrues : les dollars, les dollars. Faut produire et vendre.
Mais il faut reconnaître toutefois qu'il existe quand même des boulangeries-artisanales de qualité qui commencent à se développer dans des villes en développement urbain, avec une nouvelle clientèle qui découvre des sortes de pains et de gâteaux qui leur étaient inconnus, jusque là habitués au pain en carré et à la crème au beurre. Tant mieux, mais la pâtisserie artisanale ou semi-industrielle demeure un produit de luxe que l'on achète pas tous les matins.

Pour conclure, au Québec, on vit dans un milieu francophone, mais dans une société de l'amérique du nord, avec ses codes, ses lois et sa mentalité, à laquelle il faut s'adapter coûte que coûte si l'on ne veut pas faire un retour direct à la mère-patrie. Mais rien que pour les grands espaces, la campagne ou la petite montagne que l'on peut atteindre sans passer 3 heures en auto et de la congestion routière, une vie moins stressante avec moins de monde, pas de grèves toutes les semaines, de la neige en hiver, des belles couleurs en automne, les pommes, halloween, les cabanes à sucre, les chemises de bûcheron, les accents québécois, les nouveaux amis, ça en vaut la peine, mais il faut sans cesse activer le feu dans la forge, battre le fer car ici il faut se débrouiller tout seul et ne compter que sur soi-même et rester soudés en famille.

Ah, j'oubliais pour Ziggy, notre fiston : il est très heureux dans son école alternative publique, dans laquelle avec Isa nous participons à l'apprentissage de la vie d'un enfant avec chacun son rôle : aux parents l'éducation générale et aux professeurs, l'éducation scolaire.
À la différence d'une école normale, les parents sont plus présents, soit en classe avec les maîtresses pendant les cours, soit à animer des ateliers, comme de la cuisine ou des sciences. Au moins, on sait ce qui se passe dans la classe de nos enfants et on participe à la vie de l'école.
Un beau projet auquel on est fier de participer, belle preuve d'intégration et Ziggy est maintenant un québécois avec un début d'accent.
Mais n'aller pas croire que ces écoles alternatives sont pour des enfants avec des TOC, non il faudrait que toutes les écoles fonctionnent ainsi, que les parents y soient plus présents, que de juste déposer et reprendre leur progéniture et je suis sûr qu'il y aurait moins de décrochage scolaire car plus de motivation et de soutien, surtout chez les gars.

Voilà, fin des haricots


jeudi 28 octobre 2010

3 ans et 120 jours




Eh oui ! Plus de trois ans sont déjà passés depuis notre installation dans la Belle Province. Rêves, désillusions, succès, échecs, aventures et mésaventures : nous en avons vu de toutes les couleurs et sommes passés par tous les états.


Gilles est arrivé au Canada avec pour objectif d'opérer une reconversion professionnelle radicale après un "plan social" en France. Il a appris le métier de boulanger, passé les qualifications professionnelles nécessaires, et tenté sa chance. Mais cela n'a pas fonctionné : il a du changer de travail trois fois en deux ans, pour se retrouver au final avec un salaire de misère et des horaires de nuit. Cela ne l'a pas découragé pour autant : il a refait une formation pour se mettre au niveau et, surtout, apprendre les méthodes de travail en usage au Québec. Cela a fonctionné : aujourd'hui il a un travail intéressant qui le passionne et dans lequel il apprend plein de choses, dans un bureau d'ingénieurs.


Quant à moi, j'avais pour projet en arrivant de monter une école d'art. Cela n'a pas fonctionné et, après avoir travaillé un an dans le secrétariat, j'ai tenté ma chance moi aussi en retournant aux études. J'ai donc passé deux années très intenses à préparer un doctorat en éducation artistique, tout en travaillant comme coordonnatrice en enseignement à côté. Passionnant, mais très difficile et incompatible avec la vie de famille. J'ai tout essayé : expos, conférences, enseignement. J'ai même monté un atelier d'art. Peine perdue. Ici c'est comme en France : pour vivre de l'art il faut soit avoir une fortune personnelle, soit n'avoir aucune responsabilité familiale. Les artistes que j'ai pu rencontrer au cours des 25 dernières années entraient tous, sans exception, dans l'un ou l'autre de ces cas de figure. Or, moi, je veux l'impossible : conjuguer pratique artistique avec qualité de vie.


Finalement, j'ai tranché. Lundi, je commence un nouveau travail, en tant qu'adjointe exécutive, qui va me permettre justement d'aller vers une une plus belle qualité de vie, c'est-à-dire de conjuguer travail, famille et loisirs sans que personne y perde.
Il nous aura donc fallu un peu plus de trois ans pour trouver notre équilibre. Cela n'a pas été facile, mais nous y sommes arrivés finalement. Le plus difficile, contrairement à ce que l'on pourrait croire, cela n'a pas été le climat. Nous nous sommes faits tout de suite aux rigueurs de l'hiver. Déneiger, pelleter, superposer des couches de vêtements pour profiter des activités d'extérieur en hiver, tout cela est une partie de plaisir. Non, le plus difficile à comprendre en fait, c'est la société québécoise elle-même. Les codes de conduite et de comportement sont parfois très déroutants. Les québécois sont méfiants et ne se livrent pas facilement. Une fois que l'on a gagné leur confiance, c'est pour la vie. Mais ça prend du temps. Beaucoup de temps.
Dans le travail, ce n'est pas évident non plus. Tout au long de mes recherches d'emploi, qui ont duré presque 3 mois, je me suis heurtée à l'incompréhension totale : mais qu'est-ce qu'une française de 48 ans vient faire chez nous, à prendre le travail des québécois ? J'ai du simplifier mon cv pour ne pas faire peur. Prendre des chemins de traverse pour convaincre les employeurs que non, je n'étais pas une personne instable (au contraire, il faut beaucoup de volonté pour émigrer) ; que non, je ne me sentais pas supérieure au commun des mortels avec mon accent pointu (je n'y peux rien si j'ai gardé l'accent parisien) ; que non, je n'allais pas démissionner du jour au lendemain avec mes diplômes universitaires (ici les diplômes sont mal vus). En plus, une carrière, cela se construit patiemment, avec des lettres de référence et des recommandations. Si on n'a pas un très bon réseau, on n'a aucune chance. L'expérience hors-Québec n'étant absolument pas reconnue, il faut donc s'attendre à de bien plus grandes difficultés lors d'une recherche d'emploi qu'en France. Autant dire que mon nouveau travail, j'ai l'intention de le garder le plus longtemps possible ! Parce que, eux, ils ont compris à qui ils avaient affaire. Il faut dire que c'est une firme multinationale : du solide et du sérieux.
Mais bon, nous avons passé toutes ces étapes maintenant. Ça y est, nous sommes installés. Enfin. Reste la prochaine étape : la citoyenneté canadienne. Nous déposons notre dossier courant novembre. Tout en sachant que, même une fois devenus canadiens, nous serons toujours des immigrés dans la Belle Province.
Mais ce n'est pas grave. Ce qui nous plait ici, c'est la nature et les grands espaces. Et là, nous ne pouvons pas être déçus, c'est sûr ! Car de l'espace, il y en a à revendre ...